Quand le bureau subit la crise. « Dans une conjoncture tourmentée, marquée par la hausse des taux d’intérêt et le retour de l’inflation, le marché tertiaire français a été mis à rude épreuve en 2023 », observe Martin Paillet, directeur d’Arthur Loyd Figuière Immobilier. Avec son équipe, le dirigeant du groupe aixois présentait le bilan 2023 du marché de bureau au château de la Gaude, dans la campagne aixoise, le 18 avril.

A l’exception de Bordeaux (+ 16 %) et Strasbourg (+ 10 %), toutes les métropoles ont vu les chiffres de la demande placée de bureaux se réduire l’an dernier : très légèrement à Toulouse (- 2 %), et fortement dans des villes comme Grenoble (- 49 %) ou Lille (- 28 %).

Aix a capté 52 % de la demande placée d’AMP 

Avec 131 400 m2 transactés, résultat en baisse de – 25 % par rapport à 2022, Aix-Marseille se classe à la cinquième place du palmarès national, derrière Paris (- 17 %), Lyon (- 24 %), Lille et Bordeaux. « Aix-Marseille n’occupe pas la place qu’elle devrait tenir, avec un résultat presque deux fois moins élevé que le Grand Lyon », constate Martin Paillet. Un bilan décevant que le broker met sur le compte de l’attentisme des entreprises et du manque de locaux neufs.

Ce résultat médiocre de l’aire Aix-Marseille cache toutefois de grandes disparités. Si la capitale régionale fait grise mine avec seulement 62 660 m2 placés en 2023, le pays d’Aix vole au-dessus des nuages : « l’an dernier, Aix a capté 52 % de la demande de l’aire métropolitaine avec 68 571 m2 placés, un score en hausse de 17 % par rapport à 2022 », éclaire le cadre d’Arthur Loyd Figuière. A Aix, pas de déficit d’offres neuves. Dans le centre-ville et au cœur du pôle d’activités des Milles, les programmes neufs ont tiré la demande, représentant 42 % des transactions (28 900 m2). « Cette offre dernière génération est plébiscitée par les grands utilisateurs », remarque Martine Paillet. Contrairement à 2022, les grandes surfaces (de plus de 1 000 m2) ont boosté le marché aixois : « elles ont représenté 55 % de la demande placée, avec 20 transactions contre 7 en 2022 », ajoute le broker. Conséquence : la surface moyenne des transactions en 2023 s’est accrue, passant de 372 m2 en 2022 à 416 m2 en 2023.

Parmi ces grands deals, deux concernent des opérations neuves : la prise à bail d’un écrin de 4 205 m2 par NH Industries (Groupe Airbus) au cœur de la ZAC de Lenfant et la vente sur plan d’un ensemble de 4 063 m2 développé par Icade et Promobi pour le compte de l’école du numérique Ynov Campus, rue de la Fourane, près du quartier universitaire. Dans le seconde main, on relève deux prises à bail de plus de 2 000 m2 : les 2 234 m2 loués par Foselev, avenue de la Lauzière, au cœur du pôle d’activités (loyer : 170 €/m2) et les 2 135 m2 pris par Securitas France, à la Duranne (loyer : 135 €/m2).

Le pôle d’activités d’Aix, moteur du marché

Marseille a son QCA Euroméditerranée ; Aix son pôle d’activités… Ce pôle tertiaire, qui s’étire sur 600 ha, à l’ouest du village des Milles, capte l’essentiel des transactions. Avec quelque 46 000 m2 placés l’an dernier (67 % de la demande aixoise), il confirme son rôle de moteur de l’économie tertiaire métropolitaine. Le secteur centre, qui offre moins d’opportunités, n’est pas en reste avec 17 % des transactions (11 484 m2). Une demande qui n’est pas rebutée par les loyers plus élevés (230 €/m2 en moyenne) que dans le pôle d’activités (146 €/m2).

L’attrait des locaux up to date entraîne une hausse du stock de seconde main. Entre 2022 et 2023, celui-ci voit sa surface passer de 52 800 à 57 000 m2. Cet engouement pour le neuf pose la question de l’obsolescence des locaux datant des années 1980/2000, avant l’entrée en vigueur des normes de performance énergétique. « 10 à 15 % des locaux sont obsolètes », affirme le dirigeant d’Arthur Loyd Figuière.

Un portefeuille de projets bien garni

Alors que le marché métropolitain souffre d’une pénurie d’offre immédiate, le pays d’Aix a un pipeline de programmes neufs bien garni : 45 600 m2 sont disponibles à l’horizon 12/18 mois. « Et plus de la moitié de cette offre (27 565 m2) est même en cours de construction, une garantie pour les entreprises en quête de locaux rapidement », assure Martin Paillet.

Parmi ces offres neuves disponibles immédiatement, citons les 1 826 m2 restant sur l’immeuble Blanc Azur développé par Cogedim au cœur du pôle d’activités (loyer : 175 €/m2) et les 2 000 m2 restant d’Urban Cap, écrin lancé en blanc par le groupe Lazard. A quelques mois de sa livraison, IWG a déjà loué la moitié de cet immeuble qui se déploiera sur 4 600 m2 le long de la rue Joliot Curie, l’un des axes principaux du pôle d’activités (loyer : 165 €/m2).

Le groupe Vinci et Perimmo, de leur côté, viennent de lancer la construction d’Ora, un programme de 1 130 m2 qui sort de terre route de Valcros, près de la ZAC de la Constance. Ce projet est proposé à la vente au prix de 3 800 €/m2 HT HD (hors parking).

Le groupe Figuière n’est pas en reste. L’opérateur aixois s’apprête à livrer Patio Cézanne, un écrin de 3 500 m2 qui a poussé en entrée de ville, dans le secteur du Val St-André près de la bretelle d’accès à l’autoroute A8. En ce printemps, 1 000 m2 restent disponibles à la vente (3 600 / 3 700 €/m2 HT HD) ou à la location (260 €/an hors parking). Ont aussi été lancés, les travaux d’Espace Lumina, un ensemble de deux immeubles en pierre sèche (3 600 m2) qui sort de terre dans le secteur de Lenfant, près du programme des Carrés de Lenfant. Ces locaux sont proposés à la vente dans une gamme de prix de 2 900 à 2 950 €/m2 HT-HD (hors parking).

Autres opérations dans les tuyaux : Jade, un ensemble de 4 000 m2 porté par la Société de la Tour Eiffel (STE). Le projet a démarré au cœur du Parc du Golf, le parc tertiaire développé par la STE depuis 2007 (37 000 m2), et sera livré en 2025.

La SMII, de son côté, prépare la seconde tranche du parc Lumière, un programme de 6 560 m2 qui poussera dans le secteur de Lenfant, près du Z5 (loyer : 185 €/m2).

Nexity va livrer Atravaia

Au second semestre 2024, Nexity livrera deux opérations : Axe Sud, un ensemble de 3 160 m2 en R+3 acquis sur plan par le groupe Financière Loger. Cet immeuble conçu par l’agence Kardham a poussé en entrée de ville sur l’avenue du Club Hippique (loyer : 195/200 €/m2). Dans le même secteur, sur la route des Milles, le groupe de Véronique Bédague achève la construction d’Atravaia, un ensemble de deux bâtiments (5 360 m2) proposé à la location (190 €/m2).

Une dynamique qui se maintient en 2024

En ce début 2024, Aix maintient sa dynamique. Avec près de 17 000 m2 placés au premier trimestre, la cité de Cézanne a capté 58 % des transactions de l’aire métropolitaine (29 340 m2). Son résultat est en progression de + 17 % par rapport au début de l’année 2023 (14 594 m2).

« La demande est là. Le marché aixois devrait se montrer résilient même si le climat des affaires demeure incertain », relativise Martin Paillet, qui anticipe un atterrissage autour de 55 000 m2 placés pour l’année 2024.

L’investissement est évidemment impacté par le contexte macro-économique. « Avec 380 M€ injectés dans la pierre tertiaire, le volume des investissements dans l’aire d’Aix-Marseille a chuté de – 58 % l’an dernier par rapport à 2022 », constate Thibault Cornillat, responsable d’Arthur Loyd France Investissement. Ce repli suit la tendance enregistrée au niveau national (- 52 %). La remontée des taux des OAT (obligations assimilables du Trésor) et des coûts de construction a refroidi l’engouement des grands investisseurs qui ont vu le rendement des opérations chuter. Les changements de mode de travail, accélérés par la crise sanitaire, ont accentué la prudence des bancassureurs. « A La Défense, de nombreux locaux sont vacants, car les entreprises ont réduit la surface occupée avec l’essor du télétravail », relève Thibault Cornillat. Les dirigeants optent pour un retour au centre de la capitale : « les bureaux y sont plus onéreux, mais c’est compensé par la réduction de la surface occupée. In fine, l’arbitrage est favorable à un retour au centre », constate le cadre d’Arthur Loyd.

Avec 198 M€ engagés, les bureaux ont capté plus de la moitié des volumes investis en 2023 dans l’aire métropolitaine. Un quart de ce montant a été injecté dans les programmes du QCA Euroméditerranée (56,6 M€). Le pays d’Aix, pour sa part, a drainé 37,3 M€, un résultat en baisse de 55 % par rapport à 2022. En 2023, la principale transaction dans l’aire aixoise a été l’achat par Sofidy du programme Les Pléiades III, au cœur du pôle d’activités. Cet ensemble de 5 640 m2 a été cédé au prix de 11 M€ par Bagan.

 

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