La location meublée non professionnelle est dans le viseur du gouvernement. Il est plus intéressant fiscalement de louer un bien en meublé plutôt qu’en location nue aujourd’hui, ce à quoi le gouvernement veut remédier. Le projet de loi de finances (PLF) pour 2025, présenté en Conseil des ministres jeudi, veut alourdir la fiscalité en cas de vente du logement loué en meublé non professionnel (LMNP). Actuellement, lorsque vous louez un logement avec ce statut, vous bénéficiez de ce que l’on nomme l’amortissement qui permet chaque année aux loueurs de déduire une partie de la perte de valeur du logement, des travaux entrepris, ou encore du mobilier, et cet amortissement n’est pas pris en compte dans le calcul de la plus-value, lors de la revente du bien. Un double gain donc qui pourrait être supprimé. En tout cas en partie. Le projet de loi de finances prévoit de réintégrer l’amortissement dans le calcul de la plus-value en cas de vente du bien.

Par exemple, si vous achetez un bien pour 100.000 euros et que vous le vendez 200.000 euros, et que la valeur amortie fiscalement pendant la location est de 20.000 euros, le montant de la plus-value imposable est de 100.000 euros (prix de vente-prix d’achat) aujourd’hui. Si le PLF est adopté, la valeur amortie sera ajoutée donc la plus-value imposable sera de 120.000 euros et non plus de 100.000 euros. «Quel intérêt reste-t-il à investir dans la location meublée, avec les risques et les charges induits, si la fiscalité pour tout type de location est uniformisée selon les règles actuelles d’imposition des revenus fonciers très légèrement améliorées et si l’amortissement du bien hors foncier est supprimé?», s’inquiète Alexis Alban, président de Lodgis, réseau spécialisé dans la location meublée traditionnelle en France.

Une mesure qui va gripper le marché locatif?

Toutefois, les conséquences de cette mesure sont à relativiser pour Baptiste Bochart, juriste chez Jedéclaremonmeublé.com. «La seule conséquence de cette mesure: les loueurs en meublé non professionnels vont voir une différence au moment de la vente mais pas au quotidien. Certains loueurs ne vendent pas leur bien mais en font don ou bien le transmettent à leur enfant lors d’une succession, donc la vente du bien n’a pas forcément lieu, nuance-t-il. Rien ne sert pour l’instant de sonner le tocsin, car la mesure, si elle devait s’appliquer en l’état, serait en réalité sans grand effet pour de nombreux loueurs.» De même, pour ceux qui vendent leur bien après 22 ans de détention, une exonération de l’impôt sur la plus-value s’applique (l’assiette de la plus-value bénéficie d’un abattement chaque année à partir de la 6e année de détention), donc la mesure n’aura pas d’impact. Selon Baptiste Bochart, les seuls qui pourraient être touchés sont ceux qui ont une stratégie d’achat-vente et conservent peu de temps leurs biens.

«Toutefois, lors de l’achat du bien, ils peuvent opter pour une déduction des frais de notaire et des commissions d’agence en charge et non en amortissement, ce qui pourra leur permettre de diminuer le montant des amortissements déduits les premières années, et donc de minimiser l’impact d’une telle mesure». Que se passerait-il en cas de moins-value à la revente, si la perte est inférieure à l’amortissement? Selon Alexis Alban, il n’y aura pas de double peine. Déjà le propriétaire fait une mauvaise affaire donc on ne peut ajouter une autre punition dans un contexte où il perd de l’argent. «Si la vente engendre une moins-value malgré l’intégration dans le calcul de l’amortissement, alors le propriétaire ne paie pas d’impôts sur la plus-value », déclare-t-il. À voir si gouvernement en décide autrement.

«L’objectif on peut le comprendre. D’une certaine manière, ça vaut le coup de se poser la question: comment se fait-il qu’il n’y ait nulle part un impôt sur l’amortissement? Mais il faut penser au contexte de pénurie de logements. Il faut voir comment faire passer cette mesure sans pénaliser le marché du logement locatif. La rotation est plus importante dans la location meublée que dans la location nue. Chaque année on remet des logements sur le marché de la location donc on répond à la pénurie de logements dans les grandes villes dans l’ancien. Cette mesure va venir gripper le marché», conclut Alexis Alban. Reste à voir si le projet de loi de finance sera adopté en l’état.

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