Le secteur s’enfonce dans la crise. Entre avril 2023 et mars 2024, 358 600 logements ont été autorisés à la construction, soit 19,8% de moins que sur les 12 mois précédents, selon les statistiques publiées mardi 30 avril par le ministère de la Transition écologique.
Un nombre historiquement bas. Selon la Fédération française du bâtiment (FFB), il faut remonter à 1992 pour trouver une activité aussi faible. Dans le détail, les maisons individuelles ont fait l’objet de 129 200 autorisations (-22,2%), tandis que les logements collectifs en ont obtenu 229 300 (-18,4%). Rien qu’à Marseille, 20 000 logements manquent à l’appel.
Provence-Alpes-Côte d’Azur, région la plus touchée avec l’Ile-de-France
Mais l’individuel est encore plus lourdement touché qu’il n’y paraît, car le nombre de permis pour ces logements continue de s’éroder mois après mois, alors qu’il se stabilise dans le collectif. Une explication peut être trouvée dans la fin du prêt à taux zéro pour les maisons individuelles, le gouvernement souhaitant moins encourager ce mode d’habitat, qui accentue l’étalement urbain aux conséquences environnementales délétères.
Au sein des logements collectifs, les résidences (étudiantes, seniors, etc.) tirent un peu leur épingle du jeu avec une baisse de « seulement » 8,8%. Les régions les plus tendues, Île-de-France et Provence-Alpes-Côte d’Azur, ont connu des diminutions sensibles du nombre des permis délivrés avec respectivement -26,1% et -28,8%. Les Hauts-de-France et la Bretagne s’en sortent un peu mieux que les autres régions de l’Hexagone, avec des reculs de 4,8% et 8,7% respectivement.
Le nombre de chantiers commencés, qui suit traditionnellement celui des permis de construire, continue également de plonger, avec 283 200 mises en chantier entre avril 2023 et mars 2024, soit une baisse de 23,3%. Un nombre lui aussi historiquement bas. Le ministère de la Transition écologique prévient cependant que ce dernier chiffre est davantage sujet à caution du fait d’une collecte de données plus parcellaire sur les mises en chantier.
Conséquences sur l’emploi
« Pour l’emploi, c’est catastrophique« , a alerté le président de la FFB, Olivier Salleron, selon qui 300 000 emplois vont être perdus dans le secteur de la construction en trois ans par rapport à début 2023. « Le bâtiment, c’est un paquebot: quand il avance, il entraîne tout le monde. Aujourd’hui, le paquebot est arrêté, et il va falloir des années pour le relancer« , a dit Olivier Salleron, qui ne voit « pas de rebond avant fin 2026« .
Plusieurs promoteurs ont annoncé des plans sociaux, tandis que des acteurs plus petits déposent le bilan. Les causes de la crise sont multiples. D’abord, des chocs extérieurs. Les prix des matériaux de construction ont flambé depuis la pandémie de Covid et cette situation s’est aggravée avec la crise énergétique consécutive à la guerre en Ukraine.
La remontée des taux d’intérêt a également entamé la capacité des ménages à investir dans l’immobilier. Quant au gouvernement, il est régulièrement accusé de faire des économies budgétaires sur le logement, en réduisant progressivement des dispositifs de soutien à la construction (prêt à taux zéro, niche fiscale Pinel, financement du logement social…). Les normes environnementales plus strictes, visant à construire des bâtiments moins énergivores et plus adaptés au réchauffement climatiques, ont aussi rendu la construction plus coûteuse, pointent les organisations patronales.