« Le parcours résidentiel est-il définitivement bloqué dans les Bouches-du-Rhône ? » Telle était la question en forme de constat à laquelle ont tenté de répondre les participants à la conférence-débat organisée à Marseille par l’Agence départementale d’information sur le logement des Bouches-du-Rhône (Adil 13), ce 13 juin dans l’hémicycle de l’hôtel du département. « La notion de parcours résidentiel désigne le processus qui fait que, tout au long de la vie, une personne ou un ménage fait évoluer son habitat en déménageant pour répondre à ses besoins, changeant de type et de taille de logement, de localisation résidentielle et/ou de statut d’occupation »,décrypte Thierry Moallic, directeur de l’Adil 13. Longtemps passablement compliquée, cette mobilité est aujourd’hui aussi contrainte que celle d’un automobiliste empruntant l’autoroute Aix-Marseille aux heures de pointe.
Une série d’indicateurs confirme ce blocage. Les plus spectaculaires sont la hausse des prix de vente des logements et la baisse de la construction. « Un effet ciseau qui entraîne une décorrélation croissante entre l’offre et la demande », constate le dirigeant de l’Adil. La plupart des indicateurs sont dans le rouge carmin. Exemple : le taux de rotation dans le parc locatif social. Ce chiffre qui mesure le nombre de ménages ayant changé de logement s’est effondré en dessous de 3 %, illustre David Ytier, le vice-président de la Métropole Aix-Marseille Provence (AMP) délégué au logement, à l’habitat et à la lutte contre l’habitat indigne. Conséquence, les locataires du parc social sont assignés à résidence : « Ils ne bougent plus ! », lâche, fataliste, l’élu salonnais.
Et les listes d’attente pour accéder aux HLM s’allongent comme un jour sans pain : début 2024, 106 000 ménages sont en attente d’un logement social dans les Bouches-du-Rhône, soit 15 000 de plus qu’en 2022. « Ce chiffre est en progression constante depuis huit ans »,selon Robin Hamadi, directeur de l’Association régionale des organismes HLM Provence-Alpes-Côte d’Azur – Corse (ARHLM Paca-Corse).
Un parc social saturé
Cent six mille : c’est quasiment dix fois plus que le nombre de logements conventionnés attribués chaque année dans le département. Et la situation s’aggrave car le taux de croissance du parc social buccorhodanien est au point mort : « Ce taux est de 1,4 % dans les Bouches-du-Rhône, un niveau deux fois moins élevé que dans le Var et les Alpes-Maritimes »,relève Robin Hamadi. Pas étonnant dans ces conditions de voir le taux de rotation du parc HLM dégringoler : « Il est passé de 4,7 % fin 2023 à 3,8 % sur les cinq premiers mois de l’année 2024 »,lâche le dirigeant de l’ARHLM.
La rouille n’affecte pas que le premier maillon de la chaîne du logement :
« Tous les segments du marché sont grippés. Partout, on rencontre les mêmes difficultés d’accès au logement. Les ménages ne trouvent plus de logements adaptés à leurs moyens »,égrène le « M. Habitat » de la Métropole.
Le parc locatif privé sous tension
Le parc privé n’échappe pas à la thrombose. « Son taux de rotation a chuté de 25 à 15 % en cinq ans. Moins dix points en cinq ans, c’est énorme ! », cingle Nicolas Rastit. Et celui qui était encore président de l’Unis Marseille-Provence-Corse* de pointer l’attrition du parc locatif libre sous l’effet de l’arrêt de la construction neuve et de la montée en puissance des locations touristiques de courte durée. Cet engouement pour les locations type Airbnb plaide en faveur d’une réforme de la fiscalité. « Car aujourd’hui, le placement dans la pierre nue ne présente aucun intérêt. C’est même l’investissement le plus fiscalisé de France ! »,râle François-Xavier Guis, président de la Fnaim** Aix-Marseille-Provence. Le législateur avait pourtant fini par se saisir du sujet. Mais… le projet de réforme qui était en discussion au Parlement est aujourd’hui en stand-by, suspendu au verdict du scrutin du 7 juillet… « On attend aucune amélioration avant plusieurs mois… »,souffle Nicolas Rastit.
Ce parcours sans issue affecte l’attractivité du territoire. « AMP affiche un solde migratoire négatif. Il y a plus de ménages qui quittent le territoire d’Aix-Marseille que de ménages qui s’y installent »,soupire David Ytier. Pour dégoter un toit à un prix qui ne soit pas réservé à un héritier de Madame Bétancourt, les ménages s’installent de plus en plus loin de leur bassin d’emploi. Un phénomène accentué par l’essor du télétravail qui a réduit le temps de présence au bureau.
Verrous multiples
Le contexte macroéconomique a ajouté une belle couche de glu sur le parcours résidentiel. « En 2020, on vivait avec des taux négatifs. Un ménage pouvait emprunter à 0,8 % sur quinze/vingt ans pour acheter son logement », indique Thierry Lopez, responsable du marché habitat et prescription immobilière de la Caisse d’épargne Cepac. Les tensions géopolitiques ont sonné la fin de cette période de l’argent gratuit. « Fin 2023, le taux moyen des crédits immobiliers se situait autour de 4,2 % »,précise le banquier. Cette remontée brutale des taux a évidemment réduit les capacités d’emprunt des particuliers :
« Le ménage qui pouvait emprunter 220 000 € en 2020 ne peut aujourd’hui obtenir que 165 000 € de son banquier », témoigne Thierry Lopez.
La capacité d’achat des clients ayant fondu comme neige au soleil, le marché immobilier est aujourd’hui aussi animé qu’une statue de Pompéi. Les jeunes sont les premières victimes de ce resserrement de l’accès au crédit. Alors qu’ils sont d’ordinaire les plus mobiles (23 % des 20-24 ans ont changé de logement en 2019), les voilà aujourd’hui contraints de réprimer leur envie de déménagement, faute de moyens suffisants.
Même punition pour les personnes âgées. « Si les plus de 65 ans souhaitent généralement rester le plus longtemps à domicile, avec une adaptation de leur logement, on manque de solutions alternatives entre le logement et les Ehpad*** », remarque Thierry Moallic. Les chiffres sont sans appel : « Seulement 3 % des 65-79 ans ont changé de logement au cours de l’année précédente »,rappelle le dirigeant de l’Adil.
L’accession réservée à une élite privilégiée
Si le marché locatif devient inabordable pour les jeunes, que dire de celui de l’accession ? Dans de nombreux secteurs du département, le niveau des prix de vente agit comme un verrou rendant l’accession impossible. Et la Provence cultive les paradoxes. Alors que les acheteurs se font rares, les prix de vente ont amorcé une décrue partout en France… sauf dans la région. « Entre mars 2023 et février 2024, les prix des appartements anciens ont poursuivi leur hausse de 2,7 % dans le département »,observe Sandra Rosano, notaire représentante de la Chambre des notaires des Bouches-du-Rhône.
A Marseille (+ 2,9 %) et à Aix (+ 2,3 %), les valeurs ont continué de grimper. Le neuf est au diapason : alors que les promoteurs ont mis le pied sur le frein, les tarifs des logements neufs ont encore augmenté de 1,2 % sur la même période.
Les promoteurs ont mis le pied sur le frein
Dans les rangs des promoteurs, les voiles sont baissées. « L’an dernier, le nombre de constructions neuves a chuté de 23 % dans le pays. La crise est là », se désole Arnaud Bastide, le président de la Fédération des promoteurs immobiliers de Provence (FPI Provence). Dans les Bouches-du-Rhône, le nombre de permis délivrés a chuté de 30 %, avec 8 600 logements autorisés en 2023 contre 12 400 un an plus tôt. « La baisse est générale, mais le décrochage est très marqué dans le pays d’Aix », constate le patron de la FPI Provence. Huit mille six cents logements, c’est nettement moins que l’objectif de 11 000 logements que la Métropole AMP affiche dans son Programme local de l’habitat (PLH). L’alibi du Zéro artificialisation nette (ZAN), brandi par de nombreux maires, ne trouve pas grâce aux yeux du promoteur : « Le ZAN, c’est un faux débat. Ce sera un sujet sur certaines communes périphériques. Mais pas dans les grandes villes… »,martèle-t-il.
Même si les opérateurs ressentent une accalmie depuis le début de l’année, l’horizon reste bardé d’incertitudes. L’effet ciseau a toujours cours :
« Les coûts techniques de production ont flambé de 30 % quand les taux bancaires ont été multipliés par quatre en deux ans. Cette double hausse, les clients ne peuvent tout simplement pas l’assumer », s’étrangle Arnaud Bastide.
Des logements inadaptés aux besoins
La tension exacerbée a pour corolaire le mal-logement. « De plus en plus de ménages sont piégés dans des logements inadaptés à leurs besoins, bloqués par la saturation du social et le coût trop élevé de l’accession à la propriété », note Thierry Moallic. Le parcours résidentiel est maillé de feux rouges. « L’écart de coût entre le parc locatif privé et le parc locatif social est tel que ce dernier endosse en quelque sorte le rôle de refuge, alors qu’il était auparavant considéré comme une simple étape dans le parcours résidentiel des ménages »,ajoute le directeur de l’Adil.
L’absence de fluidité des parcours contient son lot d’effets pervers. Des maux qui ont pour nom suroccupation, éloignement, vétusté… Autant de dérives qui font le lit des marchands de sommeil. A Marseille, cette économie de la misère a été cruellement mise en lumière le 5 novembre 2018 avec l’effondrement des immeubles de la rue d’Aubagne.
Produire plus… oui… mais comment ?
Recapillariser tous les maillons de la chaîne du logement : telle est l’ambition du PLH voté par les élus métropolitains fin février 2024. « Ce n’était pas évident de mettre 92 maires d’accord. Mais le document adopté à l’unanimité acte la volonté collective de produire du logement »,affirme David Ytier. Onze mille précisément, avec 5 200 logements sociaux et abordables. « Il faut actionner tous les leviers : le logement social, le logement locatif intermédiaire, le locatif libre, l’accession sociale, l’accession libre, etc. On a besoin de toute la palette de l’offre résidentielle », insiste l’élu. La Métropole doit également permettre de répondre aux défis que chaque commune a du mal à appréhender isolément. Un exemple : le Bail réel solidaire (BRS). Ce dispositif d’accession sociale marqué par la dissociation du foncier et du bâti suscite le scepticisme de certains édiles. « Pour favoriser le BRS, la Métropole est prête à porter le risque en apportant la totalité de la garantie d’emprunt à la place des communes »,précise David Ytier.
Du côté de la ville centre d’AMP, on est au diapason : « Il faut produire ! », abonde Patrick Amico, adjoint au maire de Marseille en charge de la politique du logement et de la lutte contre l’habitat indigne. Le PLH prévoit la réalisation de 4 500 logements par an dans Marseille.« Et encore… il s’agit d’un minimum compte tenu de l’ampleur des besoins », rappelle l’élu marseillais. La marche vers les 4 500 est très haute.
« Le Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI) voté fin 2019 ne permet la production que de 3 000 à 3 200 logements. Le ZAN nous coince un peu. L’acquisition-amélioration, ce sera au mieux 500 logements par an. Et la densification via la surélévation ne remplacera jamais la construction neuve », égrène Patrick Amico.
Mission impossible alors ? « On a des gisements sur des terrains qui sont déjà artificialisés »,insiste l’élu. Et en 2023, près de 3 500 permis de construire ont été délivrés dans la deuxième ville du pays. Un chiffre certes en baisse de 11 % par rapport à l’année précédente. Mais de manière moins prononcée que le gadin enregistré dans tout le pays (– 26 %).
Le défi de l’acceptabilité sociale
Reste enfin un verrou à ouvrir : l’acceptabilité sociale. « Il faut réhabiliter l’acte de construire dans l’opinion », martèle l’élu phocéen. David Ytier plaide quant à lui « pour le lancement d’une grande campagne nationale afin d’expliquer la nécessité de produire du logement ». Une campagne pour contrecarrer le cliché qui assimile « la construction de logements au bétonnage ». Pour montrer l’exemple, AMP prévoit de remettre à plat son système d’aides à l’accession. « On va harmoniser les six régimes qui existaient dans chaque intercommunalité. L’objectif est de flécher les aides de manière efficace vers les territoires qui en ont le plus besoin », indique l’élu métropolitain.
En attendant, le débat sur le malthusianisme des élus passe au second plan : « J’aimerais bien avoir beaucoup de permis à signer. Or, depuis plusieurs mois, nous recevons très peu de demandes », observe l’adjoint phocéen.
Un (tout petit) choc d’offre
Créer un choc d’offre ! Le mot d’ordre figure dans le projet de loi présenté début mai par le ministre du Logement, Guillaume Kasbarian. Ce texte, aujourd’hui mis entre parenthèses par la dissolution de l’Assemblée nationale, vise notamment à accélérer la rotation dans le parc HLM en résiliant le bail des ménages qui bénéficieraient indûment d’un logement social. « Cette réduction du plafond de ressources pour être éligible à un logement à loyer modéré ne concernerait que 3 000 ménages dans le département. C’est dérisoire rapporté aux 106 000 demandes enregistrées », souligne Robin Hamadi. Cette réforme poserait en outre la question du relogement de ces ménages appelés à sortir du parc social. « Passer d’un logement social à un logement intermédiaire, cela représente un surcoût de 300 à 400 euros mensuels. » Une dépense tout simplement inabordable pour la plupart de ces ménages dont les revenus sont aussi éloignés de l’ISF (Impôt de solidarité sur la fortune) que Paris de Vladivostok (Russie)…
Pour le directeur de l’ARHLM, le cœur du problème est ailleurs : « C’est l’absence de construction massive d’une offre locative sociale. » Une carence d’autant plus néfaste que l’écart des loyers entre parc privé et parc HLM ne cesse de se creuser : « Le loyer moyen d’un LLS (Logement locatif social) est de 6 €/m2 contre 12,8 €/m2 pour le parc locatif privé », rappelle Robin Hamadi.
Le logement des salariés, enjeu d’attractivité
Le gouvernement rêve d’un choc d’offre. En attendant la floraison des grues, ce sont plutôt les secousses du choc de la demande que le pays ressent. « Depuis le début de l’année, le nombre de demandes de salariés en quête d’un toit recensées sur la plateforme d’Action Logement (AL’in) a augmenté de 20 % »,témoigne Sandrine Bordin, la directrice régionale d’Action Logement Services (ALS). Trente mille salariés, dont un tiers de moins de 30 ans, sont en attente d’un logement dans la région.
Face à la pénurie d’offres, « certains salariés sont contraints de dormir dans leur voiture ». D’autres qui ont pourtant les moyens d’acheter leur nid « ne trouvent tout simplement pas d’offres sur le marché », relate la directrice d’ALS. A défaut de solutions à court terme, la filiale d’Action Logement étoffe son dispositif d’aides : « Depuis le 4 juin, la garantie Visale est ouverte aux travailleurs saisonniers »,annonce Sandrine Bordin.
ViagéVie viager social intergénérationnel
Le maintien à domicile des personnes âgées : tel est le fil rouge de ViagéVie, le dispositif de logement en viager social intergénérationnel déployé par la Banque des territoires et Soliha Provence (Solidaires pour l’habitat). « 90 % des plus de 65 ans sont propriétaires de leur domicile », rappelle Sandrine Dujardin, directrice générale adjointe de Soliha Provence. Avec l’inflation des charges, nombre de seniors ne parviennent plus à régler les frais d’entretien courant de leur logement. ViagéVie permet de combattre cette précarité en achetant le logement de ces seniors.
« Grâce au bouquet et à la rente qu’ils perçoivent, ces derniers peuvent rester dans leur appartement et régler leurs besoins en services à la personne ainsi que les travaux d’adaptation nécessaires à leur âge canonique »,explique la dirigeante de Soliha.
Seules conditions : le logement doit être adapté au grand âge et le senior éligible doit être autonome. Lorsque, au décès du crédirentier, le logement se libère, il est transformé en logement social. Lancé en 2021, le dispositif est pour l’instant testé dans le centre-ville de Marseille. « Mais Soliha travaille avec la Banque des territoires pour qu’il essaime dans d’autres communes », précise Sandrine Dujardin.
Un accès au crédit trop encadré ?
Pour faciliter l’accès au crédit, certains militent pour l’allègement des normes du Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) qui plafonnent le taux d’effort des ménages qui empruntent pour acheter un logement à 35 % de leurs revenus. « Ce seuil bloque tout le système »,soupire Thierry Lopez. La Cepac, comme d’autres banques, avait décidé d’accorder une tolérance de 20 %. Succès garanti ! « Toutes les banques ont consommé rapidement leur enveloppe », affirme le banquier.
D’autres plaident pour de vieilles formules comme les prêts dits « in fine » ou « hypothécaires ». Le représentant de la Cepac n’est pas convaincu. « Le crédit in fine est une forme de financement réservée aux gros investisseurs en quête de défiscalisation. » Même réserve vis-à-vis du crédit hypothécaire « qui mobilise le patrimoine de l’emprunteur »et à ce titre l’expose à un risque de perte…
Pour Thierry Lopez, ces solutions s’apparentent « à des mesurettes… Des pis-aller qui ne vont pas remettre la machine en route… »
Le BRS nouvelle solution qui doit convaincre
Un nouveau dispositif est apparu dans la boîte à outils : le BRS (Bail réel solidaire). « C’est un dispositif qui cible les ménages exclus du marché classique », explique Yannick Stasia, directeur général de Façonéo, société publique locale qui a lancé son propre Organisme de foncier solidaire (OFS). « Le BRS est un maillon intermédiaire entre le logement social et le logement en accession », décrypte le dirigeant. La dissociation de la propriété des murs et du foncier permet d’alléger le coût d’achat.
Reste à convaincre les ménages. « Les candidats ont besoin d’être rassurés. On doit leur expliquer que le BRS ne présente pas de risque », ajoute Yannick Stasia. Les banquiers également se révèlent un brin frileux avec un dispositif qui sort des canons du financement traditionnel. « On ne sait pas vraiment comment garantir ce type de produit », reconnaît Thierry Lopez. Et d’avouer que « la Cepac pour l’instant a financé peu de BRS ».
L’EPF Paca au soutien de la production
Depuis 22 ans, l’Etablissement public foncier Provence-Alpes-Côte d’Azur (EPF Paca) apporte sa pierre à l’édifice constructif en portant des terrains pour le compte des communes et de leurs groupements. « L’EPF a été créé en 2002 pour pallier la pénurie de logements dans la région », rembobine Frédéric Gabert, directeur général adjoint de l’EPF. Grâce au produit de la Taxe spéciale d’équipement (TSE), l’instrument acquiert des fonciers sans recours à l’emprunt… une faculté qui le préserve des fluctuations des taux bancaires. « 80 % de nos opérations concernent l’habitat. Avec à chaque fois un minimum de 40 % de logements sociaux », précise le dirigeant.
La feuille de route de l’établissement fixe un objectif de production de 3 000 logements par an. Un niveau qu’il a du mal à atteindre. « Depuis 2018, on est plutôt sur un trend de 2 400 logements », souligne Frédéric Gabert. Pour accélérer, les administrateurs de l’EPF ont donc accepté d’adapter le budget : « Nous étions sur un engagement annuel de 115 M€ d’acquisitions. Ce montant devrait passer à 150 millions pour être au niveau de l’ambition de notre Programme pluriannuel d’intervention (PPI) », avance le dirigeant.
L’encadrement des loyers dans le brouillard
En 2022, la Ville de Marseille a demandé à la Métropole de porter auprès du gouvernement sa demande d’encadrement des loyers sur son territoire. Après l’adoption du PLH, le dossier attend désormais la signature du décret du ministre du Logement.
Pour l’heure, aucun parapheur n’est avancé. « On cherche désespérément un ministre qui veuille bien le signer »,soupire Patrick Amico. Le délai met les nerfs de l’élu à vif : « Mille cinq cents logements sortent chaque année du marché locatif classique pour se muer en location de courte durée. Dans certains secteurs comme le quartier du Vieux-Port, la hausse est même vertigineuse », constate l’élu.
Solutions multiples et jouer collectif
« Faire bouger certaines règles fiscales, urbanistiques et techniques permettrait de répondre aux nouveaux usages liés aux évolutions des modes de vie », affirme Thierry Moallic.
Des initiatives sont déjà en cours de réflexion ou de mise en œuvre. Et le directeur de l’Adil 13 de citer l’allègement des règles de droit de mutation, la prééminence de l’occupation pleine sur l’occupation temporaire, la transformation de bureaux en logements, la transformation de grands logements en colocation pour étudiants, la captation des logements vacants, la régulation renforcée de la location des meublés de tourisme…
Il faut évidemment produire des logements. « Mais pour débloquer les parcours résidentiels, il faut agir de manière plurielle tant la crise est protéiforme », renchérit Thierry Moallic. Et les solutions ne sont pas individuelles : « Il convient de travailler tous ensemble pour trouver des solutions pérennes et efficaces », avance Judith Dossemont, la présidente de l’Adil 13. Un jouer collectif « plus que jamais indispensable pour traverser la tempête politique que nous connaissons », conclut l’élue départementale.
* Sébastien Lieutaud a succédé à Nicolas Rastit à la tête de l’Unis Marseille-Provence-Provence (Union des syndicats de l’immobilier) le 21 juin.
** Fédération nationale de l’immobilier.
*** Etablissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.