Les propriétaires bailleurs sont depuis plusieurs années, malmenés par le législateur. C’est le constat qu’a formulé le Syndec qui, dans un contexte de manque de logements, a lancé un nouveau cri d’alarme. « Notre retour d’expérience est que les propriétaires choisissent le Airbnb, non pas pour le profit, mais pour être tranquille, car la tranquillité n’a pas de prix », a confié, en préambule, Catherine Blanc Tardy, sa présidente.
Les bailleurs sont aussi confrontés à de multiples maux, comme des impayés de loyer, ou un squat au départ d’un locataire, etc. « Cela peut même virer au cauchemar lorsqu’il est question de suroccupation subie, d’insalubrité et d’indécence créées, d’arrêté de mise en sécurité avec nécessité de relogement », a-t-elle estimé. Ces constatations sont issues d’une participation du Syndec en qualité de représentant des propriétaires privés au sein de différentes commissions, telles que la commission départementale de conciliation, la commission de coordination des actions de prévention des expulsions, le Comité régional de l’habitat.
« Dans le même temps, l’Anil et l’Etat dénoncent une crise du logement avec une pénurie d’une ampleur inédite depuis 30 ans », a noté Bernard Brisco, coprésident du Cercle de l’Immobilier.
La Fondation Abbé Pierre évoque à ce jour 2,3 millions de ménages qui attendent un logement social. Or, selon l’Anil*, il y aurait 3 millions de logements vacants en France, soit 9,5 % du parc privé. « La remise de 10 % des logements en location représenterait une année de construction neuve. Le réinvestissement du parc reste un axe majeur de la satisfaction des besoins de logement », a considéré Me Benjamin Naudin, avocat spécialisé en droit immobilier.
Locations saisonnières et Airbnb
En dépit des dernières mesures, telles que la réduction à six semaines au lieu de deux mois de délai pour la résiliation du bail après un commandement demeuré infructueux, une véritable politique visant à créer du logement n’a toutefois pas été initiée. Et même, poursuit Bastien Brignon, avocat, maître de conférences à la faculté de droit d’Aix-en-Provence, « la réglementation punitive progresse avec la dernière loi numéro 2024-322 sur ‘l’habitat dégradé’ en date du 9 avril 2024 qui poursuit trois objectifs : prévenir la dégradation de l’habitat, accélérer la réhabilitation et lutter contre les marchands de sommeil et l’habitat indigne ».
Cette loi crée une nouvelle procédure d’expropriation des immeubles indignes à titre remédiable. Plusieurs dispositions renforcent le permis de louer. La loi enrichit le registre national d’immatriculation des copropriétés, qui devra comporter de nouvelles données sur les marchands de sommeil.
Dans ce contexte, on ne peut que constater la croissance de la location saisonnière de courte durée et notamment celle du Airbnb, qui peut poser des problèmes en copropriété. La proposition de loi visant à remédier au déséquilibre du marché locatif durcit à présent le ton : réduction de l’abattement sur ces revenus à 30 %, DPE rendu obligatoire, possibilités pour le maire de réduire la tolérance de 120 à 90 jours…
Dans le même temps, en matière de copropriété, la Cour de cassation, dans un arrêt de la 3ème Ch Civ du 25 janvier 2024, retient que « dans un immeuble à destination dite d’habitation bourgeoise, si l’activité exercée dans l’immeuble n’est accompagnée d’aucune prestation de services accessoires ou seulement de prestations mineures ne revêtant pas le caractère d’un service para-hôtelier, la Cour d’appel en a exactement déduit que cette activité n’était pas de nature commerciale ».
Selon Me Naudin, s’il est vrai que les décisions récentes des tribunaux rendues en matière d’Airbnb semblent être plus favorables au propriétaire bailleur, il n’en demeure pas moins que le règlement de copropriété, la destination de l’immeuble et les troubles de voisinage sont autant de freins à d’éventuels débordements.
(*) Agence nationale d’information sur le logement