Cofondateur de Spliit, une start-up parisienne spécialisée dans la recherche de bureaux pour les entreprises, Matthieu Lalou partage son analyse des évolutions récentes dans le secteur de l’immobilier de bureaux. Face à la généralisation du télétravail et aux nouveaux besoins des entreprises, il évoque les défis de la centralisation vers les grandes villes, l’optimisation des espaces de travail, ainsi que les opportunités et les obstacles liés à la transformation des bureaux vacants en logements.
Affiches Parisiennes : Pouvez-vous nous présenter Spliit ?
Matthieu Lalou : Spliit est une agence spécialisée en immobilier de bureaux que nous avons créée avec Loïc Harang, un ami d’enfance, il y a cinq ans. Aujourd’hui, nous sommes 25 à travailler au sein de la startup. Chez Spliit, nous accompagnons les entreprises, principalement les startups, les PME et les ETI, pour trouver des bureaux. Nous sommes présents à Paris, ainsi qu’à Nantes depuis un an et demi. Nous avons mis en place chez Spliit trois piliers pour accompagner nos clients. Le premier est le digital. Nous avons développé en interne un outil qui permet à nos consultants d’être plus efficaces et à nos clients de mieux suivre leurs projets. Chercher des bureaux pour une entreprise n’est jamais facile, c’est coûteux, c’est souvent le deuxième poste de dépense après les salaires. Il y a aussi un aspect d’image qui est important. Nous avons donc mis en place cet outil digital, ainsi qu’un programme d’accompagnement client pour garantir un maximum d’efficacité et de valeur ajoutée. Enfin, un point de différenciation important : nous sommes en mesure de présenter toutes les offres du marché et nos honoraires sont 30 % moins élevés que ceux de nos concurrents.
Où vous situez-vous sur le marché actuellement ?
À Paris, nous sommes plutôt bien positionnés, ayant réalisé un peu plus de 200 transactions l’an dernier. Cela signifie que nous avons accompagné 200 entreprises dans leur recherche de bureaux. Depuis le début de Spliit, nous avons accompagné plus de 450 entreprises sur des projets allant de 100 à plus de 10 000 mètres carrés. À Nantes, où nous sommes présents depuis un peu moins longtemps, nous avons accompagné une dizaine d’entreprises.
Quels sont vos prochains objectifs ?
Nos prochains objectifs sont assez simples. Nous souhaitons continuer à nous développer à Paris, notamment dans des secteurs comme Boulogne, Neuilly, Levallois ou même la rive gauche, où nous sommes encore peu présents. Ces zones sont pourtant recherchées par de nombreuses entreprises. L’objectif est également de se développer en région, à l’instar de ce que nous avons fait à Nantes, et d’ouvrir des antennes dans les grandes métropoles régionales telles que Bordeaux, Lille, Lyon, ou Aix-Marseille.
Les entreprises se dirigent vers les centres-villes, à proximité des hubs de transport et des environnements vivants […]
Avec la Covid et la généralisation du télétravail, les besoins de bureau des entreprises ont évolué. Où en sommes-nous aujourd’hui ?
Les besoins des entreprises en termes de bureaux ont beaucoup changé. La tendance actuelle est de chercher moins de mètres carrés, mais de meilleure qualité. Les collaborateurs étant moins présents au bureau en raison de la généralisation du télétravail, les espaces de travail sont repensés pour être plus conviviaux et adaptés aux échanges collectifs. Les bureaux sont également mieux situés, souvent dans des endroits plus attractifs et dynamiques. Les entreprises se dirigent vers les centres-villes, à proximité des hubs de transport et des environnements vivants, ce qui explique l’explosion du marché parisien depuis la Covid. En revanche, les marchés de la périphérie, notamment de la deuxième couronne, sont plus compliqués avec un taux de vacance élevé.
Dans cette optique de « moins mais mieux », qu’est-ce qui est mis en place ? Des open spaces, des espaces plus conviviaux ?
Nous voyons plusieurs évolutions. Les open spaces se sont généralisés, mais ils sont accompagnés de plus en plus de salles dédiées à la concentration ou de one-one pour échanger sur un projet. Ensuite, il y a généralisation des espaces collaboratifs. Les cuisines, en particulier, sont devenues des lieux hybrides qui vivent toute la journée, servant de lieu de réunion, de travail informel, ou simplement de pause. Elles sont de plus en plus grandes et centrales dans les entreprises.
Cette centralisation vers l’intérieur des grandes villes, se poursuivra-t-elle dans les années à venir ?
Il est fort probable que cette tendance se poursuive. Les entreprises continuent de rechercher des localisations centrales, ultra accessibles. Toutefois, il faut prendre en compte la pénurie de mètres carrés dans les centres-villes, comme à Nantes par exemple. Lorsque les entreprises ne trouvent pas de bureaux disponibles en centre-ville, elles doivent parfois se tourner vers la périphérie, bien que cela ne soit pas toujours l’option idéale. Il faut trouver le meilleur compromis. Le loyer peut également être un frein, toutes les entreprises ne peuvent pas se payer des bureaux en centre-ville, souvent deux fois plus onéreux qu’en périphérie.
Techniquement, transformer un bureau en logement n’est pas simple et peut être coûteux.
Sur les bureaux vacants, la transformation en logement est de plus en plus évoquée, qu’en pensez-vous ?
C’est un véritable sujet, d’autant qu’un projet de loi a été voté pour faciliter cette transformation. Aussi, beaucoup de mètres carrés sont disponibles aujourd’hui. Cependant, bien que cela ait du sens, la mise en œuvre reste complexe. Techniquement, transformer un bureau en logement n’est pas simple et peut être coûteux. Parfois, il est même plus rentable de démolir et de reconstruire. Il y a également des enjeux environnementaux à considérer. Cette transformation n’est donc pas encore largement répandue, et bien que des efforts soient faits pour faciliter ce processus, cela prendra du temps. Il ne s’agit pas seulement de convertir des bureaux en logements, mais aussi en résidences étudiantes ou autres, ce qui nécessite une adaptation des infrastructures environnantes.
Les Jeux de Paris 2024 ont-ils eu un impact sur les bureaux et la recherche des entreprises ?
Non, les Jeux ont surtout impacté les entreprises directement concernées, qui ont trouvé des solutions temporaires, comme des centres de coworking. En revanche, l’activité de l’immobilier de bureaux a été affectée, notamment en raison des difficultés d’accès au centre de Paris et de l’incertitude autour des projets pendant cette période. Certains projets ont été mis en stand-by, mais depuis septembre, nous observons une reprise des demandes. Les projets ont été décalés, mais ils n’ont pas été abandonnés, ce qui est tout à fait encourageant.