Le pavillon, habitat désiré par une grande partie des Français, mais souvent décrié. Un peu plus dâun quart (27%) des ménages franciliens vivent dâailleurs en pavillon. Ce dernier est toutefois sans cesse remis en question par la loi climat et résilience, avec lâobjectif de zéro artificialisation nette. Emmanuelle Wargon, ancienne ministre du Logement, avait dâailleurs qualifié de «non-sens écologique» les maisons individuelles. «On oppose souvent habitat pavillonnaire et préservation de la biodiversité urbaine», résume Aliénor Heil-Selimanovski, spécialisée en architecture et urbanisme à lâInstitut Paris Région, lâagence dâurbanisme de lâÃle-de-France, qui a participé à une étude publiée ce jeudi sur le pavillonnaire francilien.
La tendance est à la démolition des pavillons pour construire des immeubles et limiter lâétalement urbain. En moyenne, 7 logements voient le jour par maison détruite dans les Hauts-de-Seine par exemple. Pas moins de 6000 logements collectifs sont réalisés chaque année sur des emprises dâhabitat individuel en Ãle-de-France. Le pavillon est-il amené à disparaître? Il sera en tout cas «amené à évoluer, à muter. Câest un objet dâinquiétude, de polémique», prévoit Jean-Philippe Dugoin-Clément, vice-président de la région Ãle-de-France, en charge du Logement.
20% des pavillons occupés par une personne seule
Damien Delaville, urbaniste qui a participé à lâétude sur le pavillonnaire francilien, observe toutefois «depuis deux/trois ans un recul de la densification dure. Les communes font un peu marche arrière en freinant le potentiel de densification. Elles préservent plus lâhabitat rare. Elles ont observé des effets pervers dus à la disparition des pavillons comme des difficultés dâapprovisionnement en eau, des réseaux saturés». Des solutions simples existent pour éviter de surdensifier tout en préservant les pavillons: «On peut gagner 30% dâespace habitable sans changer lâaspect physique de lâurbanisme, en travaillant sur la continuité urbaine de la rue, sur les espaces creux en rehaussant des bâtiments, sans aller sur une reconstruction dure», propose Jean-Philippe Dugoin-Clément. Une sorte dâhabitat individuel superposé qui pourrait composer la ville de demain.
Autre piste pour éviter lâétalement urbain: «encourager lâhabitat intergénérationnel, la colocation et le coliving , soutenir le changement dâusage pour lutter contre la sous-occupation des logements», préconise Aliénor Heil-Selimanovski. Surtout lorsque lâon sait que 20% des pavillons en Ãle-de-France sont occupés par une personne seule. Jean-Philippe Dugoin-Clément pointe aussi le fait que les pavillons naissent souvent «au fil de lâeau, de manière informelle, non coordonnée».
Des formes dâhabitats intermédiaires
Afin dâaider les collectivités à repenser une stratégie, lâInstitut Paris Région a classé les pavillons en cinq catégories dont lâhabitat immobile qui obéit à des règles de gestion collective, en copropriété par exemple, qui peuvent bloquer lâévolution du tissu urbain. Câest notamment une forme dâhabitat où les primo-accédants sont très présents et peuvent avoir une capacité financière plus limitée, les empêchant de repenser le bâti. Ce type dâhabitat représente 52% de lâhabitat individuel francilien. Autre catégorie: lâhabitat dégradé, souvent ancien, avec de nombreux logements locatifs exploités par des marchands de sommeil bien souvent, qui fragilise certains secteurs avec des bâtis surexploités et suroccupés. Lâhabitat patrimonial avec des biens classés ou dâun intérêt historique (Cf maisons en meulières, ateliers dâartistes…) est plus protégé du fait de sa rareté.
Deux autres formes dâhabitats ont été répertoriées: lâhabitat réinvesti qui désigne des pavillons anciens rénovés ou qui ont connu des extensions comme des vérandas ou des surélévations, adaptés à de nouveaux usages comme la colocation ou le coliving et enfin lâhabitat densifié, une construction neuve qui prend place dans des dents creuses par exemple ou par le biais de divisions parcellaires. Le risque induit par les nouveaux usages comme la colocation et le coliving est de faire perdre à la maison individuelle «sa fonction dâaccueil des couples avec enfants», comme lâindique lâétude et ainsi dâévincer les familles et de les envoyer aux franges de lâÃle-de-France ou plus loin encore.
La visée de lâétude est aussi dâaller au-delà dâune conception très cadrée de la maison individuelle idéale et du logement collectif moins désirable, car supposant de partager des espaces et de réduire les extérieurs. Des découpages sont possibles permettant de créer de plus petits logements collectifs accolés ou superposés, disposant tous de généreux extérieurs.