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Quelle est la conjoncture immobilière départementale ? Le marché est-il plus propice aux acquéreurs qu’aux vendeurs ? Quels types de biens sont les plus prisés ? Éclairage avec Muriel Pozouls-Bounel, vice-présidente de la Chambre interdépartementale des notaires du Gers, du Lot et du Lot-et-Garonne.

Les ventes en chute libre

« Sur le volume des ventes, tout confondu (appartements anciens, maisons anciennes et terrains à bâtir), on a une chute de – 25 % entre 2022 et 2023 », pointe du doigt Muriel Pozouls-Bounel. Bien qu’elle refuse de « qualifier cette baisse de crise immobilière grave », la notaire s’accorde à dire que cette dégringolade est « conséquente ». « On est passé de 4 240 ventes en 2022 à 3 180 en 2023… » Les chiffres sont sans appel et témoignent d’une contraction du marché en comparaison avec ces dernières années.

Mais alors, quels facteurs expliquent une telle dégringolade ? « C’est un tout ! Il y a d’abord les banques qui ont freiné les financements. Alors que sur les années 2021 et 2022, les prêts étaient consentis très facilement », met en exergue la notaire Muriel Pozouls-Bounel. Autre facteur qui ne plaide pas en faveur du marché : le bondissement des taux d’intérêt des prêts immobiliers. À la mi-octobre 2023, ils dépassaient aisément les 4 %. En mars 2022, ils tournaient en moyenne autour de 1 %. Dernier point soulevé : la lenteur de la régularisation des dossiers. « On est à 4 mois de délai quand même… »

« Les prix stagnent »

La logique de marché voudrait que si le nombre de ventes diminue, les prix des biens fléchissent. La réalité est tout autre. « Les prix stagnent. Il y a peut-être eu une légère baisse en fin 2023, mais ce n’est pas suffisamment représentatif », note Muriel Pozouls-Bounel. Il y a bien sûr des disparités entre les territoires et les types de biens.

Le marché immobilier des appartements anciens voit d’ailleurs rouge pour les acquéreurs. De l’est à l’ouest, l’évolution du prix au m2 sur 1 an est à la hausse (+ 3,3 % en moyenne). La Lomagne gersoise et le Condomois enregistrent la plus forte augmentation : + 13,3 %.

Tout comme le marché des terrains à bâtir, avec une évolution du prix de vente sur 1 an en hausse de 19,3 %. En y regardant de plus près, seul le Gers landais, autrement dit l’Armagnac, enregistre une augmentation (+ 11,5 %). Les autres territoires virent au vert pour les acheteurs : – 4,6 % pour la Lomagne gersoise et le Condomois, – 2,8 % pour le pays auscitain, – 1,5 % pour le Gers pyrénéen…

Muriel Pozouls-Bounel regrette une « réglementation devenue drastique » pour les zones constructibles.
DDM illustration – Sébastien Lapeyrère

La tendance est autre pour le marché des maisons anciennes, avec une évolution du prix de vente sur 1 an légèrement négative au niveau départemental (-1,9 % en moyenne). L’agglomération auscitaine tire notamment son épingle du jeu en enregistrant une baisse de 13,9 %.

Qu’en est-il dans le chef-lieu ?

La dynamique est-elle la même dans la préfecture du Gers ? Réponse affirmative de l’agence immobilière auscitaine Gabriel Art. « Les prix affichés sont stables, indique son responsable Nicolas Perrier. En revanche, on a un pourcentage de négociation qui augmente, parce qu’entre les meilleures conditions qu’on pouvait avoir en 2021 et aujourd’hui, les personnes ont perdu à peu près 25 % de capacité d’emprunt. »

Une analyse corroborée par les chiffres transmis par la Chambre interdépartementale des notaires. Le marché des appartements anciens enregistre ainsi une légère hausse (0,7 %) du prix au m2 sur 1 an, avec une valeur médiane du m2 atteignant 1 630 euros. Tendance à peu de chose près identique pour les maisons anciennes, où une hausse du prix de vente entre 2022 et 2023 de 2,6 % est à noter. Le prix de vente médian est, lui, de 174 400 euros. Seul le marché immobilier des terrains à bâtir, au niveau de l’agglomération auscitaine, est à la baisse (- 2,8 %).

Les maisons gasconnes conservent la cote

Même si les planètes ne sont pas alignées pour faire de belles affaires, certains biens gardent une belle cote sur le marché gersois. « C’est vrai que les belles propriétés trouvent toujours acquéreurs. Les maisons gasconnes sont toujours recherchées », souligne la notaire.

Les terrains à bâtir pâtissent, eux, « d’une réglementation compliquée », expose Muriel Pozouls-Bounel. « Je reste convaincue que l’obtention des autorisations n’est pas forcément facile à gérer pour les constructeurs », poursuit-elle. Un paradoxe dans un département aussi rural que le Gers. « La réglementation pour les zones constructibles est devenue drastique. Résultat, il y a de moins en moins de terrains », notifie-t-elle.

Des acheteurs locaux

Si les ventes de biens ont dégringolé l’an passé, plus de 3 100 transactions immobilières ont tout de même été enregistrées dans le Gers. Mais qui sont les acheteurs ? « Il n’y en a pas un qui se détache en particulier », confie Muriel Pozouls-Bounel. Et contrairement à certaines idées reçues : « Les papis et mamies n’achètent pas tellement », glisse-t-elle en rigolant.

Le marché immobilier des terrains à bâtir dans le Gers n’a pas le vent en poupe.
Le marché immobilier des terrains à bâtir dans le Gers n’a pas le vent en poupe.
DDM illustration – Sébastien Lapeyrère

En revanche, l’effet Covid-19 semble, lui, s’essouffler. Souvenons-nous : l’après pandémie avait en effet vu nombre de citadins fuir les grandes métropoles hexagonales pour s’installer en campagne. « Je trouve que c’est plus les locaux – qui achètent – à l’heure actuelle », partage la notaire.

« Un espoir que les choses s’améliorent »

L’année 2023 n’aura donc pas été une année faste pour le marché immobilier gersois… Mais quand est-il en ce début d’année 2024 ? « J’ai l’impression que les taux d’intérêt des prêts immobiliers commencent à baisser légèrement. On a espoir que les choses s’améliorent dans les mois à venir », conclut Muriel Pozouls-Bounel. La patience pourrait donc bien être le meilleur allié des acquéreurs comme des vendeurs.

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