l’essentiel
Le mis en cause aurait sous-estimé des biens immobiliers pour, derrière, les racheter lui-même et s’enrichir personnellement. Le préjudice serait de plusieurs centaines de milliers d’euros. La direction du premier groupe immobilier de France a lancé une enquête interne, afin de comprendre comment des telles pratiques ont été possibles.

Branle-bas de combat chez Foncia le 13 septembre dernier. Les salariés de l’agence des Minimes à Toulouse ne se doutent de rien, mais à l’ouverture, plusieurs responsables de la maison mère du premier groupe immobilier de France, Emeria, débarquent en force. Le président Philippe Salle pilote en direct cette affaire, le directeur du service transactions, Jordan Frarier, est là aussi. Tout comme la direction des ressources humaines. Les salariés sont convoqués, un à un, pour des entretiens dans des bureaux séparés. Qui était au courant ? Qui est impliqué ? Et depuis combien de temps cela perdure ? L’ambiance est pesante. Le mot d’ordre de la direction parisienne : éteindre l’incendie avant que l’affaire ne s’ébruite et que l’image du groupe n’en soit durablement écornée.

Il sous-estime des biens et rachète à vil prix

Selon nos informations, un négociateur est soupçonné d’avoir volontairement sous-estimé des biens immobiliers, pour les racheter à vil prix pour son propre compte. Au nez et à la barbe de Foncia qui a théoriquement des procédures en place pour éviter ces pratiques formellement interdites. « En principe, le négociateur doit envoyer le dossier d’estimation du bien et le compromis de vente au service juridique, lequel fait appel à d’autres agences Foncia pour estimer le même bien » confie une source interne à La Dépêche du Midi. L’escroc aurait racheté une dizaine de biens sur 18 mois, selon les premiers éléments de l’enquête interne. Soit un préjudice de plusieurs centaines de milliers d’euros. « C’est un malin, il ciblait la clientèle senior sur des sorties de défiscalisation, les retraités faisaient confiance. Lui fixait des prix à environ 30 000 euros à 50 000 euros en dessous du marché. » Toujours selon nos informations, le négociateur a été mis à pied par Foncia, ainsi qu’un directeur des ventes. Des entretiens de licenciement sont en cours.

Comment l’escroc a-t-il pu échapper à la chaîne de contrôle ?

Plusieurs questions restent en suspens. Y a-t-il eu des complicités ? Comment a-t-il contourné la chaîne de contrôle et comment se fait-il que le ou les notaires n’aient pas décelé le subterfuge ? Foncia a-t-il été moins regardant sur les transactions, alors que le marché secoué par la crise immobilière, est atone depuis plusieurs mois ? Pour arriver à ses fins, le négociateur escroc aurait créé des sociétés civiles immobilières (SCI).

Contacté, Foncia précise que son collaborateur a « agi a priori seul au sein de son agence, dans son intérêt, en violation des règles éthiques » ; « c’est au cours de l’été, qu’ont été identifiés des dysfonctionnements » ajoute le groupe immobilier. « La direction a entrepris une recherche approfondie sur une série d’achats successifs de biens immobiliers réalisée par 4 SCI (Société civile immobilière) différentes ». L’enquête interne a ainsi permis « de mettre en lumière l’implication d’un consultant immobilier inscrit dans les statuts de ces SCI violant ainsi la charte de déontologie interne ».

Y aura-t-il des suites judiciaires ?

Les deux collaborateurs de Foncia mis en cause « ont été tous entendus par le siège le 24 septembre, afin d’acter la fin de l’enquête disciplinaire dont les conclusions seront rendues sous peu. » À Toulouse, Foncia compte 260 collaborateurs, 4 500 locations et réalise 500 ventes par an. La justice toulousaine pourrait s’en saisir, ces agissements relevant de l’escroquerie ou de l’abus de confiance. À ce stade, le parquet de Toulouse n’a pas d’enquête ouverte pour ces faits. Pour combien de temps ?

Comment le groupe Foncia définit-il le prix d’un bien ?

Le négociateur aurait sous-évalué des biens et les aurait rachetés à vil prix. Pourtant, selon le groupe Emeria « une charte éthique et de déontologie s’applique à l’ensemble des collaborateurs Transaction et Administration de biens du Groupe ainsi qu’à leurs proches qui souhaitent faire l’acquisition d’un bien immobilier par l’intermédiaire de nos agences ». Le collaborateur acquéreur se doit de :

Informer expressément et pleinement le client mandant de sa qualité de collaborateur du groupe Emeria, en nommant la société à laquelle il appartient ; indiquer le montant du prix de la transaction ; fournir une attestation d’estimation du bien de moins de trois mois ; préciser si l’acquisition est réalisée à des fins patrimoniales ou commerciales ;
Obtenir par mail l’autorisation expresse de son supérieur hiérarchique et du service conformité ; faire rédiger impérativement l’avant-contrat de vente par un notaire.

Source du Lien